BOUILLON CULTUREL DE L’ÉTÉ 2016

Les déchets plastiques dans le milieu marin
Impact sur l’écosystème méditerranéen

 

L’esprit fondateur des « Bouillons culturels des Quatre Saisons » est ancré sur le partage, en toute générosité, des connaissances scientifiques, littéraires, artistiques, ou culturelles autres, détenues par les Membres de Brasil Azur. Qu’elles soient issues d’un métier ou d’une passion, ces compétences sont mises au profit des participants à ces rencontres, et toujours dans une ambiance de saine convivialité.

 

Samedi dernier, le 17 septembre 2016, il était question des déchets plastiques dans le milieu marin, et en particulier dans notre mer méditerranéenne. Membre de Brasil Azur, Maria Luiza Pedrotti, directrice de l’Expédition TARA Méditerranée, nous a ainsi informés, en termes objectifs, des dangers qu’encourent les milieux marins et des responsabilités qui nous incombent. Elle nous a également fourni des détails sur ses périodes de vie dans TARA, bateau mythique taillé pour les conditions extrêmes… dont le nom est un clin d’œil à Scarlett O’Hara, dans « Autant en emporte le vent… »

 

 

 

 Affiche de Thierry Dardanello

 

 

Public attentif et intéressé, réuni au Café Frei à Nice, géré par Catherine Esek. En même temps que les participants savouraient les cafés préparés par Hamza, aux provenances les plus diverses, ils perdaient aussi leurs restes d’insouciance… Car Luiza a tenu un discours rigoureux et non défaitiste, donc particulièrement convaincant.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voici un résumé de cette discussion si enrichissante, fourni par notre conférencière :

 

L’accumulation de débris de plastique dans la nature est une des grandes préoccupations environnementales de notre temps, non seulement pour la biodiversité marine mais aussi pour la santé humaine.

Les plastiques sont la part la plus importante de déchets marins produits par les activités humaines. Si certains détritus proviennent des activités maritimes, en moyenne 80 % des déchets rejetés en mer arrivent par la terre, amenés par des systèmes d’assainissement, les fleuves, les rivières ou tout simplement par le vent et les tempêtes. En Méditerranée, les plastiques représentent même la quasi-totalité des déchets flottants.

Quelques chiffres :

La production mondiale de matières plastiques n’a cessé d’augmenter ces dernières décennies (280 millions de tonnes en 2012) : le volume absorbé par la mer est proprement inimaginable. Partant du principe que 10 % des plastiques produits sont des déchets (environ 30 millions de tonnes), il a été évalué à 8 millions de tonnes le plastique qui rentre dans les océans chaque année.

Les effets du plastique sur les écosystèmes marins les mieux documentés concernent les grands animaux (tortues, oiseaux) qui mangent ou sont piégés par les déchets plastiques. Un million d’oiseaux et 100 000 mammifères marins meurent chaque année de l’ingestion de plastiques. Par ailleurs, les déchets visibles affectent le tourisme et perturbent notre relation avec des espaces naturels. Les coûts socio-économiques qui en découlent sont importants.

La grande majorité du plastique aquatique existe sous la forme de “micro-plastiques” presque invisibles à l’œil nu (< 5 mm). Ils sont produits par la lente fragmentation et dégradation des macroplastiques sur des longues périodes, ou ils entrent directement dans l’eau, issus de nos cosmétiques (contenant des microbilles), des pâtes dentifrice ou des fibres détachées du linge dans les machines à laver.

Ces plastiques sont de véritables éponges à polluants. Confondus avec le plancton et mangés par les poissons, ils remontent la chaîne alimentaire finissant donc dans nos assiettes !! sans que nous sachions vraiment les risques que cela représente pour notre santé. Ces plastiques hydrophobes et non biodégradables sont aussi colonisés par des microorganismes, tels les bactéries, las algues, les organismes benthiques, et peuvent transporter ou disséminer des espèces invasives ou pathogènes bouleversant ainsi tout l’écosystème.

Les plastiques sont maintenant partout, dans les océans jusqu’aux pôles, dans les lacs et rivières. En 1997, le capitaine Charles Moore Fondation Algalita a été le premier à découvrir une zone dans le nord de l’océan Pacifique, appelée le « 7eme continent », où les déchets plastiques flottants s’accumulent. Cette gigantesque poubelle sur l’océan s’étend sur une surface d’environ 3,4 millions de Km2, soit près de 6 fois la superficie de la France, et une profondeur de 30 mètres. La quantité de plastique y est 10 fois supérieure à celle du plancton. Cette « soupe » de plastique est ingérée et par les poissons et même par le plancton, la base de toute la chaîne alimentaire.

En Méditerranée, il n’y pas de structures permanentes comme celles observées dans le Pacifique, cependant la Mer Méditerranée est une des mers le plus polluées de la planète. Nous connaissons malheureusement trop peu de choses sur ce qu’il advient de ces plastiques.

Sensible à cette problématique, la Fondation TARA a organisé avec les scientifiques la première expédition d’envergure en Méditerranée pour mieux comprendre les impacts du plastique au niveau de l’écosystème de cette mer.

La fondation TARA EXPÉDITIONS est une organisation française à but non lucratif, agissant depuis 2003 en faveur de l’environnement et de la recherche.  En 7 mois d’expédition, TARA a visité 13 pays et prélevé 2 300 échantillons. Les plastiques et le plancton ont été recueillis avec un filet Manta et Bongo et les 2300 échantillons prélevés ont été envoyés pour analyse dans les 20 laboratoires qui collaborent avec TARA dans le monde.

 

 

Crédit photo : A. Deniaud Garcia – Filet Manta, Tara Expédition

 

 

L’Expédition TARA Méditerranée est basée sur 2 volets :

Scientifique : son approche est pluridisciplinaire, afin de quantifier et d’identifier les plastiques de surface et aussi les polluants organiques et des organismes planctoniques associés au plastique. Les effets provoqués par cette pollution sont ainsi étudiés par des spécialistes en biologie, chimie, par des physiciens et des taxonomistes. Nous avons même un entomologiste qui étudie les larves d’insectes qui se reproduisent sur les plastiques. Les résultats montrent que la concentration moyenne des débris sur l’ensemble de la surface de la mer est d’environ 200 000 particules par km2 avec des valeurs variant de 5000 jusqu’à plus d’un million de particules par km2 dans le bassin Ouest de la Méditerranée.

Sensibilisation : Tara a visité plusieurs pays pour rencontrer des scolaires, étudiants, acteurs politiques. Des réunions avec des scientifiques locaux ont été organisées dans chaque pays pour discuter des solutions.

Concernant LES SOLUTIONS : on ne peut pas nettoyer la mer !

Il faudra donc agir en amont, avant que d’autres plastiques n’arrivent dans la mer. La première action est basée sur le changement de notre comportement de consommation, à travers l’éducation et la sensibilisation à l’égard des enfants, des écoliers, des citoyens. Soutenir les actions locales comme le nettoyage des plages, des ports, avec l’aide des associations et des citoyens.

Commençons déjà tout simplement par éliminer les sacs en plastique à usage unique ! Dans cette logique, en France, ils ont été bannis en juillet 2016 et la vaisselle jetable en plastique le sera dès 2020. Il faudrait abandonner l’usage du plastique à long cycle de vie et non dégradable pour privilégier des produits naturels. La réduction de plastique à usage unique doit parallèlement être accompagnée par un ensemble d’actions sociétales et politiques : valoriser les déchets, favoriser l’économie circulaire, la recherche et l’innovation. Augmenter le Recyclage (20 % du plastique en France).

La pollution par les plastiques c’est une des rares pollutions réversibles, la santé de la mer et des océans dépend de chacun de nous.

 

 

 

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