L’Enfant de la Plantation – 2ème Partie

 

 

« La force de ce nouveau romancier, fils du sertão et pénétré d’esprit nordestin, est de refléter dans sa fresque monumentale un problème social typiquement brésilien, l’agonie d’une caste, la fin d’un patriarcat rural, la disparition d’un monde. Balzac avait étudié dans ses romans la formation de la grande bourgeoisie en France au début du XIXe siècle, Proust, la décadence de la noblesse et de cette grande bourgeoisie à la fin de ce même siècle, et notre campagnard originaire de Pilar décrit la mort des domaines agricoles, l’agonie des plantations, l’emprise croissante des grandes usines […] »

 

Tristão de Athayde, préface de Menino de Engenho

 
 

 

 
 L’auteur

José Lins do Rego, décédé en 1957, était un écrivain régionaliste, né en 1901 dans une plantation de canne-à-sucre de la municipalité de Pilar (État du Paraíba), dans le Nord-Est du Brésil. Il a connu d’importants intellectuels de l’époque, dont l’anthropologue Gilberto Freyre  ̵  que nous avons suivi dans notre première partie de L’Enfant de la Plantation  ̵  ou encore les écrivains Graciliano Ramos et Rachel de Queiroz, dont nous aurons l’occasion de parler ultérieurement sur ce site. Son premier roman est justement Menino de Engenho, publié en 1932. La traduction française ici présentée date de 2013.

 

 

L’œuvre de Lins do Rego s’inscrit dans cette quête identitaire du Brésil authentique déjà prônée par les artistes et intellectuels brésiliens de « La Semaine d’Art moderne de 1922 » (voir notre Chocolat littéraire de l’Hiver 2013). A partir de sa première publication, dix ans après cette Semaine, l’écrivain va donc se positionner, en raison des thèmes choisis, aux côtés d’auteurs tels que Graciliano Ramos ou Jorge Amado (voir notre Chocolat littéraire de l’Automne 2012). Il fera donc partie de ces écrivains qui, après la Révolution de 1930, sauront réhabiliter certains lieux du Brésil qui ont joué un rôle déterminant dans son Histoire économique et culturelle en particulier. Comme c’est le cas pour les plantations de cacao des livres de Jorge Amado, les plantations sucrières de José Lins do Rego n’interviennent pas dans ses romans comme simple décor : à l’image de la vraie vie dans cette région, les personnages et l’intrigue gravitent et se construisent entièrement autour de la culture de la canne-à-sucre. Voilà donc pourquoi L’Enfant de la Plantation (ainsi que d’autres ouvrages de cet écrivain) s’intègre dans la littérature dite « régionaliste ». L’auteur y aborde la décadence, dans la première partie du XXe siècle, de la société latifundiaire patriarcale et esclavagiste du Nord-Est brésilien.

 

 

Photo prise au Musée d’Art Naïf à Rio

 

 

Les quelques extraits que nous présenterons ensuite sont censés illustrer notre première partie consacrée à ce livre. Ils ne remplacent pas la lecture complète de l’ouvrage, qui seule transmet la vraie fraîcheur du style et l’ambiance de l’engenho dans sa globalité. Les éléments historiques et anthropologiques abordés précédemment sont importants pour la bonne compréhension du texte de José Lins do Rego.

 

 

L’ histoire de L’Enfant de la Plantation

 

 

Carlinhos (diminutif de Carlos), le personnage central du livre, est envoyé, à la mort de sa mère, dans la plantation de canne-à-sucre de son grand-père maternel, homme puissant et encore prospère.

La narration se fait à la première personne. C’est l’enfant devenu grand qui nous raconte ses souvenirs d’enfance entre quatre et douze ans, âge auquel il entre au collège.

Nous sommes devant une vraie fresque de la société sucrière du Nord-Est brésilien, composée de quarante courts chapitres, portraits savoureux et spontanés des êtres plus ou moins chers de l’entourage de Carlinhos. Le style garde la fraîcheur de l’enfance, empreinte de perplexité ou d’émerveillement, de peurs ou de rires, de rêve ou de mélancolie.

 

 

Les trois premiers chapitres nous évoquent le drame qui l’a conduit vers la plantation : son père tue sa mère et est envoyé en prison :

 

 

« C’était un bel homme, grand, aux yeux expressifs et à la moustache noire. Chaque fois que nous étions ensemble, il m’embrassait, me racontait des histoires, faisait mes quatre volontés. Tout ce qui était à lui était à moi. […] Son histoire est celle d’un homme entraîné par ses passions […] L’amour qu’il portait à sa femme était l’amour d’un fou, et il n’avait rien à faire dans cette prison où on l’amena. Mon pauvre père allait mourir dans une clinique dix ans plus tard, emporté par une paralysie générale »

« Aucun des portraits de maman ne correspond à l’image d’elle que je garde en mémoire – les traits doux de son visage, la beauté mélancolique de son regard. […] Dona Clarisse, comme l’appelaient les domestiques, ressemblait à un personnage de gravure. Elle s’adressait à tout le monde comme en s’excusant, avait la voix douce et tendre d’une jeune pensionnaire. […] Son sort fut cruel : mourir victime d’un excès de colère de l’homme qu’elle avait tant aimé, et servir de pâture aux journaux à sensation qui publièrent son portrait et des histoires mensongères sur sa vie intime – elle, toute en pudeur et en réserve. »

 

 

 

 

Du quatrième au quinzième chapitre, on découvre le nouveau monde de Carlinhos, dès son arrivée à la plantation de Santa Rosa : son oncle Jucas ; sa tante Maria, sœur et prolongement de sa maman ; son grand-père, le colonel José Paulino ; sa grand-tante Sinhazinha ; ses cousins ; les autres enfants de la plantation ; …

 

 

« Maman me décrivait toujours la plantation comme un coin de paradis. Et la Noire qu’elle avait emmenée avec elle pour s’occuper de la maison racontait tellement d’histoires de là-bas – les moutures, les bains de fleuve, les fruits, les jeux – que la plantation était devenue pour moi une sorte de royaume fabuleux de conte de fées. »

 

« Peu à peu, [les gamins de la plantation] m’abordèrent […]. Nous allâmes chiper des goyaves et des pommes d’amour dans le potager – à vrai dire, ce que nous appelions potager ressemblait plutôt à un immense verger. Une grande partie de mon enfance allait s’écouler à l’ombre de ces orangers et de ces plantureux jaquiers. »

 

« Tante Sinhazinha […] dirigeait en despote et sans pitié la maison de grand-père. C’était elle qui avait les clés de la dépense et qui donnait les ordres aux Noirs. […] Tante Sinhazinha imposait aux pauvres Noires et aux gamins de la plantation une servitude dure et cruelle. Elle recueillait des Noires toutes jeunes qu’elle faisait dormir au pied de son lit afin de pouvoir les maltraiter à son aise et donner libre cours à sa brutalité. »

 

« [C]’était l’époque où les tourterelles oreillardes, chassés par la sécheresse du sertão, descendaient en bandes vers les côtes. […] [Mes cousins et moi], nous nous tenions à l’affût, un bâton à la main, prêts pour le massacre. La soif des pauvres tourterelles était telle que nos mauvaises intentions ne les troublaient même pas. Nous les tuions à coups de bâton, et elles se laissaient faire comme si elles n’avaient pas d’ailes pour s’envoler. La sécheresse avait détruit en elles l’instinct naturel de survie. »

 

« L’eau avait tout envahi. […] Toute cette masse d’eau émettait un gémissement lugubre, entrecoupé de temps à autre du grondement des falaises qui s’écroulaient. […] Debout à l’extrémité de la véranda, grand-père contemplait ses plants de canne submergés, sa récolté pratiquement détruite. Mais il ne se plaignait pas, car il connaissait la valeur du limon que le fleuve avait laissé sur ses terres. […] Puis des bateliers revinrent et nous racontèrent ce qu’ils avaient vu cette nuit-là. Des gens dans leurs maisons, enfoncés dans l’eau jusqu’à la taille. […] Il fallait envoyer de quoi nourrir tous ces sans-abri. […] Tante Marie partagea avec ces gens la viande salée et le riz. Ils avaient l’air heureux quoi qu’il arrive, satisfaits de leur sort, d’une soumission totale. La crue avait dévoré leurs petits champs de manioc, emporté le peu qu’ils avaient. […]
̵  L’important, c’est la santé et la protection de Dieu, disaient-ils toujours.
Mais sur quelle santé et sur quel Dieu comptaient donc ces malheureux ? »

 

 

« Pour m’apprendre l’alphabet, on m’envoya chez un certain doutor Figueiredo […] Je fus reçu avec les ménagements et les égards réservés au petit-fils du seigneur de la terre. L’épouse de mon maître était une femme brune et jolie, qui m’embrassait chaque fois qu’elle me voyait et me laissait faire ce que je voulais. Elle s’appelait Judith. […] C’était [elle] qui m’apprenait à lire, à écrire et qui s’occupait de moi. Je la vis un jour qui pleurait […] Une autre fois, alors que j’étais seul dans la salle devant mon abécédaire, j’entendis de coups et des cris provenant du fond de la maison. Je compris alors que ma belle Judith était battue par son mari. J’eus envie de me précipiter dans la rue et d’appeler au secours. Mais je restai silencieux sur ma chaise, écoutant ses sanglots étouffés. Quand elle entra peu après pour me donner ma leçon, elle m’embrassa et me serra dans ses bras comme jamais. […] Mon cœur déborda d’une étrange affection pour ma maîtresse. […] Je ressentais sa souffrance comme si elle était mienne.
C’est là, avec elle, me laissant envahir par le parfum de ses cheveux noirs et caresser par ses douces mains brunes, que j’ai appris l’alphabet. »

 

 

« J’eus un autre maître en la personne de Zé Guedes, mon professeur d’obscénités. Il m’accompagnait sur le trajet de l’école. […] J’aimais écouter ces conversations dégoûtantes. […] J’appris ainsi que mon oncle Juca avait des mulâtresses dont il était le maître. […] Dans les enclos des plantations, les enfants s’initient au mystère du sexe bien avant de comprendre l’amour. La reproduction de l’espèce était pour nous un acte sans grandeur. […] En amour, nous faisions concurrence aux taureaux et aux béliers. Nous avions nos chèvres et nos vaches attitrées pour nos rendez-vous lubriques.
La sauvage promiscuité de l’enclos éloignait notre enfance et nous rapprochait de plaisirs que nous n’étions pas en âge de goûter. »

 

 

 

 

 

 

A partir du seizième chapitre, le regard de Carlinhos invite à la comparaison entre la maison do engenho de son grand-père et les propriétés des autres seigneurs des moulins. La fin inévitable de cet empire menacé ressort de la peinture « enfantine » d’un quotidien où religion, superstitions, folklore, maladies, catastrophes naturelles, assassinats, gastronomie, littérature orale, jeux… et sexe, comme on vient de le voir… s’entremêlent, dans un ordre qui défie toute attente « civilisée ».

 

 

 

Casa do Engenho d’Oiteiro, citée dans le livre.
C’est là que l’enfant-narrateur se sentait « ébloui par une boîte à musique au rouleau hérissé d’épines qui jouait Carnaval de Venise et Troubadour ».

 

 

 

 

« Mon grand-père m’amenait toujours avec lui lors de ses tournées d’inspection. Le maître visitait son domaine et allait voir de près les familles de colons sur ses terres. […] Il s’arrêtait à chaque porte et frappait aux fenêtres fermées avec ses badines en bois-de-liane. Des femmes au teint hâve nous ouvraient – des pauvres femmes qui accouchaient sur un lit de planches et allaitaient leur nombreuse progéniture pendant des années. Leurs seins pendaient comme des mamelles. […] Les enfants nus, aux ventres tendus comme des arcs. »

 

« Les jours de fête, on enlevait le drap qui recouvrait l’autel noir de jacaranda et on allumait les bougies des chandeliers. […] [N]ous allions regarder les gravures et les images. […] Les gamins nous montraient une sainte mulâtresse, un enfant dans les bras et le front marqué au fer rouge.
–    C’était une esclave, racontaient-ils. Sa maîtresse lui a brûlé le visage avec une fourchette rougie au feu.
Je pensais toujours à tante Sinhazinha quand les enfants parlaient de cette méchante dame. […] À la plantation, nul n’avait le goût de la prière quotidienne. […] Hormis tante Marie, qui m’apprit le Notre Père, personne ne m’enseignait le catéchisme. Je tenais de maman le peu que j’en savais. Je savais que Dieu avait fait le monde, qu’il y avait un ciel et un enfer et que nous souffrions ici-bas à cause d’une pomme. Les autres gamins n’en savaient pas beaucoup plus que moi. […] Pendant la semaine sainte, on nous parlait des méchancetés que les juifs avaient fait subir à Notre-Seigneur […] En cuisine, les Noires parlaient du martyre de Jésus-Christ avec une compassion à fendre l’âme. […] C’est souvent vers cette époque que venait à la plantation la vieille Totonha. La vieille femme récitait la vie, la Passion et la mort de Jésus-Christ en vers, et nous avions les larmes aux yeux quand elle nous racontait cette douloureuse histoire. »

 

« La vieille Totonha venait de temps en temps au domaine. C’était un événement pour toute la marmaille. […] Toute petite, toute rabougrie, […] elle parcourait des lieues et des lieues à pied, telle une édition vivante des Mille et Une Nuits. Quel talent elle avait pour raconter les histoires ! […] Dans sa bouche édentée, sa voix prenait toutes les intonations. […] Elle avait une mémoire prodigieuse. Elle récitait des contes entiers en vers, intercalant de temps à autre des passages en prose en guise de note explicative. […] Puis la vieille Totonha partait vers d’autres plantations et j’attendais le jour où elle reviendrait, avec ses histoires toujours nouvelles pour moi. »

 

« L’habitation des Nègres au temps de l’esclavage n’avait pas été détruite. Une vingtaine de cases, reliées par un même appentis. Même après l’abolition, aucune des Noires de grand-père ne quitta la rue case-nègres […] C’est [ici] que toute la marmaille de l’habitation trouvait ses amis : les gamins qui étaient nos compagnons de jeux et les Noires qui nous avaient donné le sein, braves serves dans les bras desquelles nous avions grandi. Nous vivions mêlés à eux, nous faisant  gronder et embrasser par les plus vieilles Noires comme leurs propres gosses. N’étions-nous pas leurs frères de lait ? […] Je ne leur avais jamais vu de maris et pourtant elles étaient éternellement enceintes, perpétuant l’espèce sans prévoyance et sans peur.
Les gamins dormaient dans des hamacs puants. Toute la case exhalait une horrible odeur de pissotière. Le matin, le sol était encore tout mouillé de l’urine de la nuit. »

 

« La plantation de Santa Fé était enclavée dans celle de grand-père. […] Pauvre Santa Fé ! Je ne l’ai connu qu’à son crépuscule. Rien n’est plus triste qu’une plantation dont la cheminée est éteinte. Une désolation de fin de vie, de ruine, qui donne au paysage rural un air mélancolique de cimetière abandonné. »

 

« [L]es maîtres de plantation étaient rarement durs envers leurs esclaves. Grand-père habillait bien les siens et les nourrissait copieusement.
« Un Noir ne vaut que lorsqu’il a le ventre plein.  […] J’ai lu dans les journaux des histoires de planteurs qui, au moment de l’abolition de l’esclavage, tuaient leurs esclaves de tant les fouetter avec des lanières de cuir tressé. Non-sens ! [..] On voulait au contraire que son Noir soit gros pour qu’il travaille et se revende mieux. […] Dans la région, Ursulino était le seul à enchaîner les siens – ses esclaves étaient dans un piteux état ! » »

 

 

« J’avais dans les douze ans quand je couchai avec une femme pour la première fois. […]
Cependant je payai un tribut prématuré à l’amour. J’attrapai le mal espagnol. Je le cachai au début aux gens de l’habitation, prenant en secret des remèdes au bord du fleuve. […] Sans succès. […] Enfin la nouvelle se sut à la maison de maître. Ce fut un scandale :
–   La syphilis, à son âge !
[…] Néanmoins, je tirai peu à peu un certain orgueil de ma maladie. J’écartais exagérément les jambes pour marcher. Je tirais gloire de cette charge de bacilles que l’amour avait laissée dans mon corps imberbe. On me montrait aux visiteurs masculins comme un spécimen de virilité précoce. Les autres planteurs s’en amusaient beaucoup, et je faisais dorénavant partie de leurs confidences. »

 

« Le mal espagnol m’avait transformé. Je n’étais plus un enfant quelconque, on me considérait différemment. On n’avait plus pour moi la condescendance que l’on réserve aux enfants. […] À présent, je voyais l’amour dans tous les recoins de la plantation : dans la rue case-nègres, au bord du fleuve, dans les paillotes. Les gamins m’emmenèrent dans les bois, où chacun attendait son tour. Dans la maison de maître, mon libertinage amusait beaucoup les hommes :
–   Bon à rien ! Cavaleur !
[…] On avait recours au collège comme à une maison de correction. Personne ne s’occupait de enfants qu’on laissait libres de tout faire, comptant ensuite sur les punitions de l’internat pour les corriger. […] J’entrais au collège avec le corps d’un homme secoué par les passions et une âme vieillie – alors que Sergio, le fils de Paulo Pompeia, y arrivait avec des cheveux longs et une âme d’ange sentant encore la virginité. Je savais tout, j’étais en avance sur mon âge, et c’était ainsi que j’allais franchir les portes du collège.

J’étais un enfant perdu, j’étais l’enfant de la plantation. »

 

 

 

Sans avoir la qualité littéraire de Fogo Morto, probablement le chef-d’œuvre de Lins do Rego, les sons, les odeurs, les mots spontanés qui se dégagent des lignes du livre ici présenté le remplissent d’une beauté captivante et nous déplacent avec bonheur vers un univers à la fois unique et universel.

 

 

 

___________________ 

José Lins do Rego, L’Enfant de la Plantation [titre orig. : Menino de Engenho], traduit du portugais par Paula Anacaona, Clamecy, Éditions Anacaona, 2013.

 

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